30
November
2020
|
17:33
Europe/Amsterdam

#Movember: lutter contre le "syndrome John Wayne"

Dans le cadre du mois de sensibilisation aux maladies masculines telles que le cancer de la prostate et le cancer du testicule (#Movember), Europ Assistance accueillait mardi dernier le Professeur Olivier Cussenot, chef du service urologie de l’Hôpital Tenon (Paris 20ème), ainsi que 3 témoins, à la fois anciens patients et/ou militants actifs pour la sensibilisation et le traitement de ces maladies. A travers leurs expériences et leurs combats, ils soulignent l’importance du dépistage et surtout celui de libérer la parole des hommes sur ces cancers masculins.

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1 homme sur 7 y sera confronté à un cancer de la prostate au cours de sa vie

« Je suis en très bonne santé aujourd’hui, grâce au cancer ! ». Et pourtant, en 2000, c’est un cancer de la prostate très agressif que se voyait détecter Roland Muntz. Enchaînant les traitements lourds (hormonothérapie, chimiothérapie…) dans plusieurs pays, il a dû également affronter trois ans d’effets secondaires : « Incontinence, impuissance, effets cognitifs… je voyais ma finitude ! » confie-t-il . 20 ans et 20 kilos en moins plus tard, il est remis, et a revu son style de vie : « Paradoxalement, le cancer m’a permis d’être en meilleure santé ». Après une carrière professionnelle effrénée entre les affaires et engagements dans la vie économique et politique locale, Roland, aujourd’hui âgé de 75 ans, n’en reste pas moins actif, puisqu’il est président de l’ANAMACaP (Association Nationale des Malades du Cancer de la Prostate), association d’intérêt général dont il est le fondateur.

Avec 50.000 nouveaux cas par an et plus de 8000 décès en France, le cancer de la prostate est le cancer le plus répandu chez l’homme : 1 Français sur 7 y sera confronté au cours de sa vie. Le dépistage après 50 ans s’avère donc nécessaire, mais n’est pas systématique : l’image du toucher rectal désagréable a la vie dure, bien que le dosage du PSA (antigène prostatique spécifique) par prise de sang se répande. C’est d‘ailleurs ce type de dépistage qui a permis de détecter la gravité du cancer de Roland. L’Assurance Maladie est souvent prudente sur les conséquences du dépistage (concernant les incertitudes de la détection – dosage anormal du PSA ne signifiant pas forcément cancer – et les effets secondaires des traitements en cas de dépistage positif voire de surtraitement), mais les médecins présents rappellent que sans le dosage par PSA, le nombre de décès par cancer de la prostate augmenterait de 50 % (12.000 vs 8.000). Et Roland Muntz de souligner que le dosage du PSA est avant tout « un outil de stratification » recommandant à chaque homme, quel que soit son âge, « de faire un suivi annuel si les résultats du PSA sont supérieurs à 1,5 ng/ml ».

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L’ANAMACaP intervient aux journées de sensibilisation de l’Institut Universitaire du Cancer. Programme et inscription ici : https://us02web.zoom.us/webinar/register/WN_ArTwsKnBQMeMFn_hIk6DmA

 

Le cancer du testicule : le cancer des hommes jeunes

En bonne santé, Julien et Stéphane le sont aussi. Pourtant, ils se sont tous les deux vus détecter un cancer du testicule alors qu’ils étaient trentenaires. Le cancer du testicule est celui qui touche le plus les hommes jeunes. Il est même assez rare au-delà de 40 ans, comme en atteste le graphique ci-dessous :

De fait, c’est un cancer souvent difficile à détecter, car il touche une population se pensant en bonne santé, car il n’est pas toujours douloureux, et car peu d’éléments (hérédité, style de vie) permettent de déterminer si une personne est à risque. C’est néanmoins une douleur qui a mis la puce à l’oreille de Julien Lahaye, cadre financier au sein de Generali Investments France : “Ma compagne – qui a été infirmière – m’a dit : « il y a deux endroits où un homme ne doit pas avoir mal : au cerveau et au testicule ! ». C’est sur son conseil qu’il a rapidement entamé un parcours médical, qui a permis la détection de son cancer, et sa rémission avec une séance de chimiothérapie dite « adjuvante », un an avoir été détecté.

« Ce sont les femmes autour de nous qui nous ont emmenés à nous faire soigner ! » confirme Stéphane Beaumont. Cadre commercial, ancien sportif de haut niveau, il ressent des douleurs à la fin de l’été il y a 16 ans, mais rechigne à consulter alors que la saison sportive commence. L’insistance de sa compagne lui sera salutaire : « Je ne serais pas mort du cancer : je serais mort de ne pas l’avoir soigné ! » insiste-t-il, rappelant que le cancer du testicule se soigne bien (moins de 100 décès chaque année en France pour près de 3000 cas).

Néanmoins, « Cancer : le mot est lancé ». S’ensuivent les traitements (une à trois chimios), qui amènent à rencontrer dans les hôpitaux de jour les autres patients traités pour tous les types de cancer, et de prendre conscience de la réalité des traitements. « On sait que les chances de guérison de notre cancer sont élevées. Certains infirmiers essayaient de dédramatiser en disant : c’est vous qui êtes là pour une angine ? ». Stéphane en vient presque au four rire en voyant les prothèses qui lui sont présentées : « des balles de ping-pong ! ». Car le traitement est le même : une orchidectomie. Un joli nom derrière lequel se cache une réalité plus crue : l’ablation d’un testicule.

« Les hommes doivent faire leur coming-out du cancer ! »

Comment en parler avec son entourage et avec ses collègues ? Julien, qui espérait éviter la chimiothérapie, en a parlé tardivement, car cela se verrait lorsqu’il perdrait ses cheveux. Mais « les collègues ne sont pas intrusifs spontanément (…) on arrive assez naturellement à savoir avec qui on veut en parler ou pas ». Les bourdes arrivent, mais sans malveillance : « Un collègue me croisant chauve m’a dit : « ah ? nouveau look ! », ne sachant pas que je revenais de chimio » en sourit Julien. Même retour de Stéphane, qui va plus loin : « J’encadrais une équipe de commerciaux, auxquels j’ai demandé de ne pas en parler aux clients. J’ai fini par me rendre compte que tous en avaient parlé. Pour me protéger et éviter que les clients ne m’appellent pendant mon traitement ». Même s’il avoue avoir détourné une partie du wifi de l’hôpital pour avoir accès à ses mails professionnels… Comme Roland, Stéphane a choisi d’en parler ouvertement et de façon militante : engagé au sein de l’association CerHom, il figure parmi les ambassadeurs de Movember en France.

Car « ce n’est pas une faiblesse, il n’y a pas à en avoir honte ! » . Mais la détection et le dépistage sont loin d’être une pratique généralisée. A l’inverse de la palpation du sein que l’on rappelait à l’occasion d’Octobre Rose, la palpation du testicule est loin d’être connue et pratiquée, et même loin d’être abordée dans les discussions entre hommes. Roland Muntz le résume un nom : « il y a une sorte de syndrome John Wayne : pour tout ce qui touche à cette zone géographique de l’anatomie masculine, on ne peut pas faillir ! ». Avec pour conséquence un silence coupable, entraînant des détections tardives avec des risques de métastase. Et une des participantes de réagir : « oui, car on veut des guerrières, mais pas des cow-boys ! ».

C’est donc la voie de l’humour qu’a choisi l’association Cerhom pour pousser à la détection du cancer du testicule avec… un vrai film de boules.